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Les traitements médicamenteux

Il existe plusieurs classes thérapeutiques

Les collyres dans le glaucome chronique

Il serait fastidieux d’énumérer la longue liste des produits disponibles en France, avec toutes leurs caractéristiques. Dans le cadre de ce site d’information destiné au grand public, nous nous contenterons de résumer les différentes classes thérapeutiques en fonction de leur mode d’action et de leurs associations au sein d’un seul collyre. Les génériques sont les copies conformes des collyres initiaux, seul l’excipient pouvant changer, ce qui a pu induire nombres de critique sur leur tolérance.

Les différentes classes thérapeutiques

lls ont été longtemps le traitement médical de première intention, et ils restent largement prescrits seuls ou en association fixe. Ils diminuent la sécrétion de l’humeur aqueuse et baissent la pression intraoculaire de 25 à 30%. Leur tolérance locale est très bonne en revanche ils possèdent des effets secondaires généraux et il convient de respecter rigoureusement les contre-indications.
Les bêtabloquants ou antagonistes béta-adrénergiques agissent au niveau des procès ciliaires en inhibant la sécrétion de l’humeur aqueuse. En raison de leur longue durée d’action, les produits le plus souvent utilisés demandent une instillation quotidienne, une fois par jour le matin en raison du fait qu’il y a une baisse vespérale et nocturne de la sécrétion ciliaire de l’humeur aqueuse.
Les bêtabloquants sont bien tolérés localement. Ils sont indolores à l’instillation, ils ne modifient pas la taille de la pupille, ils n’ont pas d’effet sur l’accommodation et n’ont pas d’effets secondaires esthétiques (pas de rougeur, pas de modification de la couleur de l’iris, pas de cernes ni de duvet palpébral). Ils induisent cependant une diminution de la sécrétion lacrymale avec parfois un œil sec. Ils sont encore mieux tolérés dans les formulation sans conservateur et à libération prolongée.
Les complications cardiaques, broncho-pulmonaires, vasculaires sont bien connues et les contre-indications absolues des collyres bêtabloquants sont 1) l’asthme et le bronchospasme, 2) l’insuffisance cardiaque décompensée, 3) les blocs auriculo-ventriculaires du 2ème et 3ème degrés, 4) les bradycardies symptomatiques (<50 pulsations/minute), 5) les syncopes de cause inconnue et 6) le syndrome de Raynaud.

Les autres complications décrites (aggravation d’une myasthénie, diminution de la libido, impuissance, asthénie, troubles dépressifs, alopécie, difficultés à l’équilibration d’un diabète, modification du profil lipidique) sont rares en dehors de la diminution de la performance sportive. Enfin, ils sont contre-indiqués en cas de grossesse ou d'allaitement. 

L’indication des bétabloquants en monothérapie sont l’hypertonie oculaire isolée (sans glaucome) et le glaucome débutant. Ils peuvent être associés à toutes les classes thérapeutiques (en association fixe ou non). Leur efficacité est moindre si le patient est déjà traité par un bêtabloquant par voie générale.
L'efficacité des bétabloquants : la baisse de la PIO est de 23-27 %.

Le TIMOLOL est la molécule la plus ancienne, très largement utilisée depuis longtemps. Elle est présente dans de nombreux collyres. D’autres molécules sont également employées, afin de tenter d’éviter certains effets secondaires : Le CHLORHYDRATE de LEVOBUNOLOL le CHLORHYDRATE de BETAXOLOL, le CHLORHYDRATE de CARTEOLOL,  le METIPRANOL, …

Plus précisément les analogues des prostaglandines (PG). Les PG sont actuellement largement utilisées de première intention du fait de leur efficacité pressionnelle, d’une posologie réduite à un fois par jour le soir au coucher et d’une très bonne tolérance systémique.
Les analogues des prostaglandines agissent en augmentant l’évacuation de l’humeur aqueuse au niveau de la voie uvéosclérale. La réduction de la pression intraoculaire est de 26 à 36% au bout de un mois. 
Les effets indésirables locaux peuvent limiter leur utilisation sur le long termeLa rougeur oculaire est habituellement transitoire et s’estompe au bout de quelques semaines de traitement. Les autres effets secondaires sont la sensation de corps étranger, prurit, kératite ponctuée superficielle, kératite dendritique et kératite herpétique par récurrence d’herpès cornéen. La tolérance locale est améliorée dans les formulations sans conservateurs (unidoses ou flacon multidoses).
Les PG peuvent entraîner une coloration irréversible de l’iris en brun chez les sujets prédisposés (avec un iris bicolore brun-vert, bleu-vert, marron-jaune).
Une augmentation de la longueur, de la couleur et de l’épaisseur des cils est fréquente. Il peut aussi y avoir une hyper-pigmentation des paupières.
Chez les patients opérés de la cataracte, ils peuvent être responsables d’œdème maculaire réversible à l’arrêt du traitement.
Les effets secondaires systémiques sont des crises d’asthme chez les sujets prédisposés, des céphalées et une fatigue.
Les contre-indications sont l’asthme, le post-opératoire de la chirurgie de la cataracte (pendant un mois), et les antécédents d’uvéïte, d’herpès et d’œdème maculaire.
Les analogues des prostaglandines sont recommandés en premier choix pour la plupart des patients hypertones et glaucomateux du fait de leur efficacité pressionnelle.

Les principaux représentants sont : le Bimatoprost, le Latanoprost, le Travoprost.

Le seul inhibiteur de l’anhydrase carbonique (IAC) utilisé par voie générale est l’acétazolamide (Diamox ) qui possède beaucoup d’effets secondaires.  Les IAC par voie locale ont des effets généraux réduits. Le dorzolamide (collyre en solution) et le brinzolamide (collyre en suspension) baissent de la PIO est de 20 à 25% pendant 12h. 
Les effets secondaires sont la blépharo-conjonctivite allergique. Il peut y avoir des brûlures et un flou visuel intermittent, une dysgueusie (6%).

La seule contre-indication est l'insuffisance rénale sévère.

Ils agissent comme des adrénergiques alpha2-agonistessympathomimétiques agonistes sélectifs des récepteurs alpha-2, permettant d’obtenir une diminution de la sécrétion d’humeur aqueuse en modulant l’activité de l’adényl-cyclase, enzyme présente dans le corps ciliaire, importante dans la production d’humeur aqueuse. 

L’apraclonidine (Iopidine)

Elle est complémentaire des bétabloquants au niveau de leur action sur le corps ciliaire. Elle possède essentiellement des effets secondaires locaux : allergie, sécheresse et troubles visuels. Elle existe à la concentration de 1% (Iopidine en monodose)  utilisée pour réduire les pics pressionnels après iridotomie ou trabéculoplastie au laser.

La iopidine à 0,5% doit être instillée trois fois par jour et est utilisée comme traitement additionnel à un traitement maximal pendant le mois qui précède une intervention. Elle n’est pas utilisée dans le traitement du glaucome au long cours en raison d’un échappement thérapeutique (tachyphylaxie).

La Brimonidine

La baisse pressionnelle est de 20 à 25%. Les effets secondaires locaux sont la sécheresse buccale et l’allergie. Les effets secondaires généraux sont les suivants : fatigue, somnolence, sensation d’ébriété, vertiges, céphalées, sécheresse du nez et de la bouche et hypotension artérielle.
La Brimonidine est formellement contre-indiquée au cours de la grossesse, en cas d'allaitement et chez le petit enfant.
Plusieurs molécules sont employées,  le tartrate de brimonidine (Alphagan) qui peut être associé au Timolol, le Brimazed qui est sans conservateur.

Les alpha2-agonistes sont contre-indiqués en cas d’insuffisance cardiaque et respiratoire sévère, d’hypotension artérielle et de traitement par les IMAO, et chez les enfants.

Parmi tous les myotiques, seule la pilocarpine est encore employée. Elle induit une contraction des fibres musculaires longitudinales du corps ciliaire, ce qui entraîne une ouverture des espaces inter-trabéculaires avec une augmentation de l’évacuation de l’humeur aqueuse.  Sa durée d’action est de six heures et doit donc être instillée trois fois par jour.

Les indications sont le traitement de la crise de glaucome aigu, la préparation de l’iris avant iridotomie et iridoplastie, le syndrome d’iris plateau et le glaucome pigmentaire.

Les effets secondaires sont très nombreux : céphalées, douleurs oculaires, myosis, baisse d’acuité visuelle et spasme d’accommodation. Chez le myope la surveillance de la rétine est nécessaire en raison du risque de décollement de rétine. La rupture de la barrière hémato-aqueuse s’accompagne avec le temps de synéchies irido-cristaliniennes. Les effets généraux des myotiques sont la fatigue, l’hyperventilation, le bronchospasme, sueurs, bradycardie, nausées, diarrhées.

Les contre-indications sont l’inflammation intra-oculaire, le glaucome néovasculaire et le glaucome malin.

D’une manière générale, l’association de deux principes actifs dans un même collyre recherchera une synergie d’action en seule instillation. L’association type associera donc une molécule diminuant la production d’humeur aqueuse à une autre molécule favorisant son évacuation. Il faut cependant garder à l’esprit que les effets secondaires de chaque collyre s’additionnent et il faut respecter les contre-indications de chaque molécule. La molécule phare base de la plupart des associations est le Timolol qui toujours bien toléré localement, et qui de plus améliore souvent la tolérance de l’autre molécule associée.

Association Brimonidine-timolol : Combigan (instillation deux fois par jour).
Association Dorzolamiode-timolol : Cosopt, Cosidime, Dualkopt (instillation deux fois par jour)
Association Brinzolamide-timolol : Azarga (instillation deux fois par jour)
Association Pilocarpine-timolol : Pilobloq (instillation deux fois par jour) qui malheureusement n’existe plus
Association Latanoprost-timolol : Xalacom (instillation une fois par jour)
Association Travoprost-timolol : Duotrav (instillation une fois par jour)
Association Bimatoprost-timolol : Ganfort (instillation une fois par jour)
Association Brinzolamide-Brimonidine Simbrinza (instillation deux fois par jour). Cette association permet d’éviter les effets secondaires des bêtabloquants, tout en étant plus actif que l’instillation des deux collyres séparément. 

Les indications des collyres

Le traitement de première intention est médical avec une réduction pressionnelle cible de 20% en cas d’HTO de 25% dans le glaucome débutant de 30% dans le GPN et une PIO cible inférieure à 18 mm Hg à toutes les visites dans le glaucome avancé.Si la PIO cible n’est pas atteinte une bithérapie avec une association fixe sera privilégiée.
Les collyres sans conservateurs sont proposés d’emblée chez le sujet jeune, en cas d’anomalie de la surface oculaire ou lorsqu’une intervention chirurgicale est envisagée.
Les règles de bon usage des collyres antiglaucomateux : instillation oculaire sans contact entre le flacon et la surface oculaire, occlusion des points lacrymaux de 1 à 2 mn afin de réduire le passage systémique et d’améliorer la biodisponibilité locale, respect des horaires d’instillation et lorsque plusieurs collyres sont prescrits au même horaire, respect d’un intervalle de 5 mn entre deux collyres, retrait des lentilles souples hydrophiles au moins dans les 15 mn qui suivent l’instillation et enfin protection cutanée pour les prostaglandines afin d’éviter l’hyperpigmentation palpébrale. Il est souvent utile de vérifier la qualité d’instillation des collyres en consultation, car 20% des patients, en moyenne, n’utilisent pas correctement leur traitement. La conservation des flacons au réfrigérateur peut faciliter l’auto-appréciation de la qualité de l’instillation. La position couchée sur le dos facilite l’instillation pour les personnes âgées. Les unidoses et les flacons non conservés sont parfois impossible à utiliser chez les personnes souffrant de déformations articulaires. 

Effet toxique local

Les collyres, même s’ils sont apparemment bien tolérés , induisent toujours des effets délétères sur la surface oculaire qui peuvent obérer l’efficacité ultérieure d’un acte chirurgical. Pour cette raison, chez une personne jeune, et d’une manière générale lorsque l’espérance de vie est élevée, il vaut mieux envisager une autre solution médicale (laser) ou chirurgicale plutôt qu’un traitement par collyres au long cours. Dans plus de 30% des cas, des effets toxiques locaux sont observés : hyperhémie conjonctivo-palpébrale, cernes, longs cils pigmentés.

La stratégie du traitement par collyres

Le traitement de première intention est généralement un collyre en monothérapie. Lorsque la monothérapie n’est pas efficace (sujet non répondeur) ou mal tolérée une autre classe thérapeutique en monothérapie doit être essayée. Lorsque la monothérapie est efficace mais que le PIO cible n’est pas atteinte alors une bithérapie doit être envisagée. Le choix de la classe thérapeutique dépend de la baisse de PIO souhaitée, des effets secondaires, des contre-indications. L’efficacité d’une classe thérapeutique est l’élément prépondérant. La classe thérapeutique la plus efficace est celle des analogues de prostaglandines avec une baisse de 31 à 33% de la PIO. Les bêtabloquants induisent en moyenne une réduction de 23 à 27%. Les alpha-agonistes et les inhibiteurs de l’anhydrase carboniques sont moins efficaces, avec une baisse de PIO de 17 à 25%.
Une bithérapie peut être prescrite de première intention si :
– La PIO est très élevée (au-delà de 30 mm Hg)
– Le GAO est très évolué au moment du diagnostic
– En cas de facteur de risque de progression (cornée fine, hystérésie basse, myopie forte, syndrome pseudoexfoliatif)
– Le jeune âge
– D’œil unique
– Sujet mélanoderme
– Antécédent familial de glaucome
Dans ce cas il est préférable d’utiliser une association fixe qui réduit les effets secondaires et qui favorise une meilleure observance. L’éventail des combinaisons fixes disponibles a largement augmenté et des combinaisons ne contenant pas de bétabloquant sont maintenant disponible.
Les associations fixes sont toutes plus efficaces que la prostaglandine dont elles sont issues. L’association bimatoprost/timolol est stastitiquement plus efficaces que les autres. Mais L’éventail des combinaisons fixes disponibles a largement augmenté et des combinaisons ne contenant pas de bétabloquant sont maintenant disponible.
L’association de trois classes thérapeutiques peut être nécessaire avant une indication opératoire. Après une mono-thérapie initiale, environ 50% des patients nécessite un second traitement au bout de deux ans. Plus de 90% des patients ayant une pseudoexfoliation capsulaire ne sont plus contrôlés par une monothérapie de bétaloquant après trois ans.

L’EMGT (Early Manifest Glaucoma Trial) montre (au stade de glaucome débutant et nouvellement diagnostiqué et en analyse multivariée prenant en compte les autres facteurs de risque de progression) que la réduction de chaque mm Hg à partir d’une PIO de 20,6 mm Hg réduit de 11% le risque d’évolution sur une période de six ans. Dans l’OHTS (Ocular Hypertension Treatment Study) montre que environ 40% des patients nécessitent au moins deux collyres pour atteindre l’objectif pourtant modeste de 20% de la PIO initiale. La Canadian Glaucoma Study a montré que lors de la mise en route d’un traitement abaissant de 30% la PIO une réduction de 19% du risque d’évolution est obtenue pour chaque mm Hg de réduction de la PIO.

Les autres traitements médicamenteux

Les inhibiteurs de l’anhydrase carbonique sont utilisés sous forme de comprimés d’Acétazolamide (Diamox) ou par voie injectable pour faire baisser rapidement une pression trop élevée. Les comprimés sont également utilisés en cas de poly-allergies locales aux collyres. Les effets secondaires sont nombreux : paresthésies péribucales ou des extrémités, altération du goût, nausées, diarrhées et perte de poids. Plus graves sont l’acidose métabolique, les calculs urinaires ainsi que le risque d’anémie, de neutropénie ou d’agranulocytose (effet idiosyncratique). Leurs contre-indications sont les allergies aux sulfamides, les antécédents de calcul rénal, les insuffisances rénales et hépatiques et les troubles hydroélectrolytiques.
Les agents osmotiques par voie orale (Glycérotone) et par voie intratraveineuse (Mannitol) entraînent une diminution rapide mais transitoire de la pression intraoculaire. Les contre-indication sont le diabète, les insuffisances cardiaque et rénale et les états de déshydratation.
Les autres traitements de nombreuses substances pourraient avoir un effet neuroprotecteur : les vitamines C et E, le ginkgo biloba, l’acide acétyl-salicylique, le ginseng etc.

Le traitement du syndrome de l’inversion du gradient de pression translaminaire

Par analogie avec le traitement de l’hypertension intra-crânienne chronique, où les agents osmotiques sont utilisés avec succès, ils ont été proposés pour traiter la neuropathie optique simulant un glaucome en cas d’inversion du gradient de pression translaminaire (cf glaucome à pression normale). Voici l’exemple d’un patient présentant initialement un champ visuel très atteint, et qui a vu cet examen s’améliorer considérablement avec un traitement au long cours par Diamox associé à du Glycérol en sirop. Bien entendu, ce traitement exige une surveillance biologique très serrée (fonction rénale, électrolytes sanguins, glycémie et cholestérol). 

Quelques nouveautés sur les collyres

Les traitements par collyres sans conservateurs unidose ou en flacon multidose suppriment le risque de toxicité liée aux conservateurs. Ils existent pratiquement pour toutes les molécules.
Deux nouvelles classes thérapeutiques agissent en remodelant le trabéculum et en le rendant plus perméable sont attendues en Europe et sont déjà disponibles aux USA. Leur efficacité est proche de celle du Latanoprost. 
– Les agonistes de l’oxyde nitrique synthase (donneurs de NO) ont une efficacité supérieure au Latanoprost et une tolérance similaire. En topique cette molécule permet de diminuer la résistance trabéculaire à l’évacuation de l’humeur aqueuse. Ce composé a été associé au latanoprost pour un traitement en une seule instillation quotidienne (latanoprostène bunod du laboratoire Bausch&Lomb) possède donc une double action sur l’évacuation de l’humeur aqueuse au niveau trabéculaire et uvéoscléral induisant une baisse de la PIO de 30%. 
– Les inhibiteurs des protéines rho-kinases ne semblent pas bien tolérées. 
Des nouveaux modes de délivrance sont en cours d’évaluation. Plusieurs implants intraoculaires permettant une libération prolongée de médicaments hypotonisants sont à l’étude. Les avantages potentiels sont évidents d’autant plus que la durée d’action semble être de six mois minimum ! Les anneaux dans le cul de sac et des plugs dans les orifices lacrymaux sont également à l’étude.

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